Au lendemain de l’assassinat de Malcolm X, l’Amérique est en crise : elle est encore largement raciste et les communautés noires sont en révolte. Les Noirs sont réprimés violemment et tués sans sommation dans des affrontements avec la police, l’arbitraire est de mise et l’ « homicide légitime » est pratiqué allègrement par tous les commissariats de police.

C’est dans ce contexte que 2 étudiants Huey NEWTON et Bobby SEALE d’Oakland, après avoir fait le tour des organisations noires existantes, vont décider de fonder « The Black Panther Party for Self Defense » qui s’inspire largement des idées de Malcolm X. Pourquoi la panthère comme symbole de leur mouvement ? Parce que « la panthère n’attaque jamais la première, mais elle sait se défendre ». Ce parti créé le 15 octobre 1966 élabore un programme en 10 points (disponible sur le site associationracines.com) revendiquant principalement le droit au logement, au travail, à l’éducation pour la communauté noire et surtout l’arrêt des meurtres et des brutalités policières.

En se basant sur les lois en vigueur concernant le port d’armes, la première action des Black Panthers sera de se procurer des armes (port légal pour tout citoyen américain) et de constituer des milices qui se déplacent, assistent aux interpellations qui ont lieu dans les rues et servent de témoin aux familles lors des procès. Un uniforme est de mise : chemise noire, cravate noire ou col roulé noir, pantalon noir, veste de cuir noir et béret noir pour couronner le tout. En quelques mois les interpellations contre les noirs du quartier diminuent fortement mais la répression contre les Black Panthers va commencer et elle sera féroce.

Le 2 mai 1967, un projet de loi demandant la restriction du port d’armes dans certains quartiers devant être débattu à l’Assemblée, pousse les Black Panthers à se rendre à Sacramento, au Capitole pour protester en lisant un texte devant les journalistes. Ils se retrouvent à l’intérieur du Capitole avec à leur tête Bobby Seale et Lil’Bobby Hutton (17 ans), semant la panique dans l’Assemblée : « des nègres avec des fusils ! ». Ils furent arrêtés et inculpés de trouble à l’ordre public. Seale et Tucker eurent les plus lourdes peines, 6 mois de prison, mais le message était passé, les Noirs étaient toujours prêts à mourir pour leur liberté mais ils étaient maintenant armés.

Le financement du Parti reposait sur la vente de fascicules (petit livre de Mao par exemple) et surtout de leur journal « the black panther » qui atteint très vite des records de vente (5000 par semaine) avec une distribution nationale. Des bureaux ouvrent dans tous le pays avec instruction obligatoire pour tous les militants (droits et devoirs), lecture obligatoire d’ouvrages de références et formation à l’autodéfense.

Le 27 octobre 1967, Huey Newton et Hilliard sont interpellés par une voiture de police, il s’en suit une fusillade, un policier est tué, un autre blessé et Newton reçoit une balle à l’abdomen. Il est incarcéré et accusé du meurtre du policier. Il s’en suit une formidable campagne nationale pour la libération de Newton, « Free Huey », si bien que le nombre des militants augmenta considérablement malgré le fait que les principaux leaders étaient incarcérés (Newton et Seale).

C’est le moment que choisit le FBI pour mettre le BPP (Black Panther Party) comme une de ses priorités nationales. Sous la conduite de Hoover, le COINTELPRO fut lancé. En février 1968, 24 militants furent arrêtés et mis sous les verrous pour des motifs allant de la vente du journal des BPP à la suspicion de meurtre.

Le 4 avril 1968, lorsque l’assassinat de Martin Luther King Jr mit le feu aux ghettos, la police lança une embuscade au local du Parti des Black Panthers la veille de leur manifestation prévue le 7 avril. Pendant 90 mn ils vidèrent leurs chargeurs sur le local, puis ils intimèrent l’ordre aux survivants de se rendre sans armes. Quand les militants sortirent, ils tuèrent Lil’Bobby Hutton de 7 balles dans le dos, Cleaver n’eut la vie sauve que parce qu’il pensa à sortir entièrement nu, pour qu’on ne l’accuse pas d’avoir une arme cachée. La popularité des BPP allait en augmentant et les obsèques de Hutton connurent une popularité jamais égalée.

Mais les pressions continues du FBI obligèrent Elridge et Kathleen Cleaver à l’exil en Algérie en Septembre 1968 où ils créèrent une branche internationale du BPP. Les assassinats se poursuivaient et on ne comptait plus les fusillades et les arrestations.

Avec l’afflux des nouveaux adhérents, le FBI infiltra le parti et commença à créer des dissensions internes et de « nouvelles recrues » commettaient de nombreux larcins qui entachaient le mouvement. Le summum fut peut-être atteint avec le recrutement d’O’Neal membre du BPP par le FBI qui aboutit aux meurtres de Fred Hampton et de Mark Clarck pendant leur sommeil le 4 décembre 1969 après qu’O’Neal les eut drogués. La suspicion régnait au BPP.

Cependant les activités sociales du BPP continuaient : patrouilles dans les ghettos, instruction des populations sur leurs droits, mise à disposition de cars pour aller visiter les prisonniers, petits déjeuners gratuits pour les enfants, et même l’ouverture d’une clinique avec des soins gratuits pour les nécessiteux.

La libération de Huey Newton le 5 août 1970, fut suivie 2 jours plus tard de l’assassinat de Jonathan Jackson (17 ans) et de l’arrestation d’Angela Davis le 13 octobre pour complicité d’assassinat. Angela Davis est libéré début 1971 mais son ami, George Jackson est assassiné en prison le 21 août 1971.

Newton s’exile à Cuba en 1974. Elaine Brown devient le leader du parti. Elle poursuit l’action sur le terrain politique, ce qui aboutit à l’élection d’un noir à la tête de la mairie d’Oakland et à l’intensification des actions sociales sur le terrain (création d’écoles, d’emplois…). Malgré le retour d’exil de Newton en 1977 qui trouve à Oakland un parti bien implanté, la conjugaison des actions du FBI et de dissensions internes, aboutissent à la mort lente et inexorable du BPP à la fin des années 1980.

Le mouvement des Black Panthers restera dans l’histoire comme le premier mouvement armé des noirs déterminé à lutter contre toutes les formes de violence faite à la communauté noire et engagé dans un mouvement social efficace.

Leave a comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *